Kielce, le 2 septembre : 22ème exposition internationale de l’industrie de la défense [pl]

Mesdames, Messieurs les Députés et Sénateurs
Messieurs les Généraux
Messieurs les Présidents et Directeurs
Mesdames, messieurs

En souhaitant la bienvenue à la conférence organisée par la France, permettez-moi de tout d’abord vous remercier d’être présents ici.
J’ai pu parcourir entre hier et aujourd’hui les allées du salon et j’ai été frappé par la diversité des matériels mais aussi la quantité de matériels de même type produits par les entreprises européennes. Pour ne citer qu’eux, combien de types de véhicules blindés ou de drones sont produits sur notre continent ?

Et s’il est souhaitable d’avoir une certaine diversité pour avoir le choix dans les matériels il me semble qu’il faut également que les matériels soient compatibles et de même niveau car les opérations d’aujourd’hui se font avant tout en coalition.

Il faut évidemment que tout le monde y trouve son compte :
- les utilisateurs doivent avoir le matériel au meilleur niveau dans les budgets alloués
- les industriels doivent engendrer suffisamment de profit pour continuer à investir pour les futures générations de matériels.

Les « dividendes de la paix » ont mis à mal l’industrie européenne d’armement. Depuis la chute du mur de Berlin, sa production a été divisée par deux. Et même les conflits actuels en Syrie ou en Afrique, ou la crise en Ukraine, ne semblent pas inverser cette tendance – au grand dam de nos alliés Américains qui depuis trente ans demandent un meilleur « partage du fardeau » (burden sharing) au sein de l’Otan.
Ensuite, les crises financières qui se sont succédé depuis 2008 ont directement entraîné l’adoption de coupes sévères dans les budgets de défense de la plupart des pays.

C’est dans ce contexte que se trouvent actuellement les firmes européennes qui restent en compétition les unes avec les autres pour l’obtention de contrats d’exportation, une lutte qui fera assurément des victimes sur notre continent, d’où la nécessité de consolider la BITDE. Hier encore, Tomasz Siemoniak, ministre polonais de la Défense Nationale a dit de façon pertinente : « A l’heure actuelle ce n’est plus un projet commercial. A l’heure actuelle, c’est un projet, au sens le plus profond du mot, patriotique ».

Il me semble important que chaque pays européen continue à investir dans sa défense mais surtout dans sa propre industrie de défense car les emplois créés par les industries de Défense sont des emplois hautement qualifiés employant des technologies de pointe qui pourront être réutilisées ensuite dans le secteur civil. Ainsi, chaque euro dépensé par chaque pays dans sa propre industrie de Défense constitue non seulement une « assurance-vie » pour la nation mais également une « assurance pour l’avenir ».

Au-delà se pose également les questions de maintien des capacités industrielles et technologiques. Vous le savez, il ne faut que très peu d’années pour perdre une capacité : deux à cinq ans suffisent pour ne plus être en mesure de réaliser ce qu’on savait faire par le passé. Vous savez également que pour regagner ces capacités des efforts considérables sur 10 ans, voire plus, seront nécessaires, et souvent financièrement comparables à ceux réalisés par la passé pour le développement de cette même capacité.

Enfin se pose la question de la souveraineté, de l’autonomie stratégique. Combien de nations européennes sont présentes sur l’ensemble du spectre industriel de la Défense ? On peut probablement les compter sur les doigts d’une main.
C’est pourquoi aujourd’hui, la France a choisi l’Europe pour destin, irrévocablement. C’est donc à l’échelle de notre continent que nous avons choisi de transposer cette « ardente obligation » qu’est l’autonomie stratégique. Nous avons souhaité préserver, pour notre continent, une capacité aéronautique, spatiale, électronique, une capacité dans le domaine des missiles. Nous l’avons fait avec ceux de nos partenaires européens qui étaient prêts à entreprendre l’aventure avec nous, l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume Uni, nous avons fait des alliances, des rapprochements, des fusions – en consentant quelquefois à des sacrifices significatifs, en termes d’emplois notamment – mais aujourd’hui les noms de Thales, de MBDA mais aussi d’Airbus, sont synonymes d’autonomie technologique, et donc stratégique, de l’Europe. Ils sont avant tout, j’aimerais le souligner, le fruit de la volonté des Etats, l’application de la maxime qui veut que « l’union fait la force », même s’ils respectent pleinement les lois du marché.

Et nous sommes soutenus dans cette démarche par nos partenaires allemands. Le 19 août dernier, le ministre de l’économie allemand Sigmar Gabriel appelait à la consolidation européenne des industries de Défense, et faisait également le même constat, à savoir qu’il était insensé de continuer à avoir des industriels européens produisant le même type d’armements ou même d’avoir les armées européennes employant toutes des équipements différents.

Car enfin pour ceux qui seraient tentés de résister à cette consolidation européenne des industries de défense, l’alternative sera inévitablement le déclin irrévocable des industries de Défense, la perte d’emplois hautement qualifiés, la perte de capacité, et surtout la perte de souveraineté. Car en effet, notre sécurité, nos capacités de défense seraient soumises à des producteurs étrangers, de qui nous deviendrions de plus en plus technologiquement, mais également politiquement et stratégiquement dépendants.

L’Europe, lorsqu’elle en a la volonté, et lorsqu’elle s’en donne les moyens, peut réussir. Cela ne dépend que de nous Européens. C’est ce qui nous amène à penser que nous vivons aujourd’hui un moment charnière dans notre histoire commune. Ne nous contentons pas d’être les témoins privilégiés de cette dynamique, soyons-en aussi les acteurs solides.

Dernière modification : 03/09/2014

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