Discours inaugurant la conférence "Indépendance énergétique et risques technologiques" [pl]

Discours pour l’ouverture du colloque indépendance énergétique et risque technologique au CCFEF, le 9 décembre 2014



Monsieur le Premier Ministre,

Monsieur le Recteur,

Monsieur le Député,

Mesdames et Messieurs les Professeurs,

Mesdames, Messieurs,


Je suis heureux d’ouvrir aujourd’hui ce colloque franco-polonais traitant de l’indépendance énergétique de nos pays dans le cadre européen, où il sera question des choix stratégiques, technologiques et scientifiques à faire, tant en Pologne qu’en France, dans les années qui viennent.


Nous nous rendons tous compte que le temps presse, qu’il agit, ni plus, ni moins, d’assurer la souveraineté de l’Europe, de préserver voire d’accroître sa compétitivité dans l’économie mondiale. L’énergie et la question de l’indépendance énergétique sont au centre des préoccupations européennes pour des raisons de stratégie et de souveraineté, mais aussi parce qu’elles sont le pilier indispensable de la relance industrielle de l’Europe.


Je me félicite, pour aborder ces thèmes, de la qualité et de la richesse des intervenants que le Centre de Civilisation française et d’études francophones de l’Université de Varsovie et l’Institut français de Pologne ont invité aujourd’hui à débattre. Je dis débattre parce qu’il s’agit là de questions ouvertes où nous sommes, c’est évident et c’est normal, loin d’être d’accord sur tout.


La France appelle de ses vœux une UE plus autonome, plus active sur la scène internationale, mais aussi plus forte économiquement et industriellement. La Pologne sait, tout comme la France, que l’énergie est une question essentielle pour notre économie, notre croissance, notre souveraineté. Il y a quelques mois, M. Tusk, à l’époque en tant que chef du gouvernement polonais, faisait le tour des capitales européennes pour convaincre les autres pays membres de la nécessité de construire une Union de l’énergie, de faire front uni pour mieux nous approvisionner, pour assurer à l’intérieur de l’UE les solidarités au besoin, c’est à dire en cas de pression ou de chantage des grands fournisseurs vis-à-vis de tel ou tel. La France a soutenu sans réserve cette initiative de la Pologne, le projet d’union énergétique pour l’Europe.
Mais cette énergie, l’Europe ne doit pas seulement l’acheter à l’extérieur aux meilleures conditions possibles. Notre souveraineté, notre économie dépendront très largement de la façon dont nous-mêmes nous la produisons. Elles dépendront aussi de la façon dont nous gérons l’énergie, acquise hors d’Europe ou produite en Europe, que nous consommons en quantité toujours plus importante.


Ayons à l’esprit qu’en 2050, avec une population mondiale atteignant alors 9 milliards, les besoins de la planète en énergie seront multipliés par deux par rapport à ce qu’ils sont aujourd’hui.


Ces questions d’énergie ne peuvent pas être dissociées des impératifs climatiques et environnementaux qui pèsent sur nous, que nous le voulions ou non. La pire des politiques, ce serait de faire comme s’ils n’existaient pas. La Pologne a organisé la COP 19 à Varsovie il y a tout juste un an, la France organisera à Paris la COP 21 dans tout juste un an. Nos pays sont bien placés pour connaître les contraintes climatiques, et savoir qu’aujourd’hui il faut penser les questions d’énergie en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, qu’il faut absolument passer à d’autres ressources que les seules ressources fossiles, hydrocarbures ou charbon.


Nous ne pouvons pas nous reposer sur un nombre trop limité de technologies, il n’y a pas de solution unique pour relever le défi de l’énergie en Europe. Diversifier les façons de produire l’énergie est devenu une absolue nécessité. Il peut y avoir au sein de l’UE des spécificités, il est normal que nous soyons différents, chaque état membre a sa géographie et son histoire. Mais chaque état membre doit, c’est d’ailleurs aussi son propre intérêt, diversifier ses ressources, choisir les moins coûteuses sans doute mais aussi les moins polluantes. La France a choisi l’énergie nucléaire comme principal pilier de son mix énergétique. En la matière nous avons développé un grand savoir-faire, nous disposons aujourd’hui, réparties sur le territoire, de 59 centrales couvrant plus de 75% de notre production d’électricité. Nous constatons avec plaisir que la Pologne, comme nous, a conscience de l’utilité du nucléaire. Le gouvernement polonais, avec son projet Politique Energétique 2050, a réaffirmé cet été son intention de développer l’énergie nucléaire. Il y est écrit que dans 35 ans le bouquet énergétique polonais devra comporter au minimum 15% de nucléaire.


Le nucléaire, d’ailleurs, n’est pas qu’une source d’énergie, c’est aussi une source d’emplois. Des emplois hautement qualifiés, et pour la plupart non délocalisables. L’impact sur l’emploi quand un pays construit et exploite des réacteurs nucléaires est important. Construire un seul réacteur de type EPR équivaut à créer 12 000 emplois directs et indirects, le plus souvent non délocalisables.


La France s’est engagée à partager son expérience avec la Pologne au moment où celle-ci se dotera d’une capacité électronucléaire, pourra lui fournir sa technologie et l’aider à acquérir les compétences nécessaires dans les domaines administratifs, techniques et scientifiques.


L’autre manière d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de CO2 est de valoriser une gestion innovante de l’énergie, en misant notamment sur des transports plus économes, des techniques de construction assurant une meilleure performance énergétique des bâtiments, le recyclage intelligent des déchets. Toutes ces pistes innovantes demandent certes des investissements en recherche et développement, mais sont prometteuses en termes de compétitivité et d’emplois, de sécurité et de souveraineté énergétiques. La Pologne et la France ont initié il y a deux ans, dans le cadre de l’opération ECO-MIASTO, une coopération très active sur toutes ces questions. Il faut l’étendre et l’approfondir, nos deux pays ont tout à y gagner.


Pour affronter les immenses défis de la souveraineté énergétique de l’Europe, nous n’avons pas de baguette magique. Mais, puisque la nécessaire prise de conscience a eu lieu dans nos deux pays, il y a des solutions humainement réalisables. Pour les atteindre ensemble, il faut la volonté politique d’y travailler en commun. Il faut mettre en commun les atouts que nous avons chacun en propre, développer en commun nos recherches scientifiques et partager nos connaissances, exploiter en commun nos impressionnants savoir-faire, affirmer en commun une politique de l’énergie résolument européenne.


Je vous remercie de votre attention.

Dernière modification : 09/12/2014

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